A propos du Dopage et de la nouvelle Loi du 23/03/99
Le Dopage existe, je l’ai rencontré. Beaucoup d’entre nous ont pu être confrontés à la triste réalité du dopage. Nier le dopage était, jusqu’à il y a une certaine période, réservé à ceux qui voulaient faire endosser ce fléau du sport à un corps médical très souvent mal informé. Depuis les révélations de l’été 98 pendant le fameux Tour de France et l’affaire Festina, nul ne peut contester la réalité du dopage. La région Nord/Pas-de-Calais a été à la pointe du dispositif de Lutte contre le Dopage avant même la Loi Bambuck de 1989, grâce à l’action conjointe d’un certain nombre de médecins convaincus de cette triste réalité.
Nous pouvons citer en particulier le Professeur NIQUET, le Docteur Jean-Pierre CACHERA, et le Docteur Michel DUCLOUX, Président Départemental de l’Ordre des Médecins, ancien Président de la Société du Nord de Médecine du Sport, qui dès 1990, écrivait : « l’honneur d’une nation ne peut dépendre de victoires acquises au prix de la santé d’athlètes sacrifiés ». Dans ce combat de tous instants, où le milieu sportif n’a pas toujours évalué le problème à sa juste mesure, la composante répressive nécessaire et légitime a souvent verbalisé « des erreurs de préparation, voire de prescriptions », mais a soulevé de nombreuses polémiques quant l’on s’attaquait au vrai mal, à partir de cas positifs contestés à tort ou à raison.
Il était temps de mettre fin à cette hypocrisie très souvent mise à jour, en particulier dans la région Nord/Pas-de-Calais, grâce à l’ étroite collaboration des Douanes, qui prouvaient l’ampleur de ce mal au vu de la répétition des importantes affaires douanières, avec saisies de produits dopants. Véritable politique pédagogique de prévention
Madame Marie-George BUFFET, Ministre de la Jeunesse et des Sports a voulu, dès son arrivée au Ministère, non seulement combattre le dopage, mais également mettre en place un vaste dispositif de protection de la santé du sportif rentrant dans le cadre d’une véritable action de santé publique. La loi adoptée définitivement par le législateur le 23 mars 1999, intitulée : Loi relative à la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage » certes à ce jour isole la France mais honore ceux qui ont le courage de la mettre en chantier.
Il ne peut pas y avoir de véritable lutte contre le dopage sans une bonne évaluation des facteurs de risques. Il ne peut pas y avoir de résultats concrets sans la mise en place d’une véritable politique pédagogique de prévention.
Le dispositif de prévention est en place grâce à la collaboration du Ministère de la Jeunesse et des Sports et du Comité National Olympique et Sportif Français, à travers la création d’une agence de prévention sportive et la mise en place progressive des agences régionales de Lutte contre le Dopage.
La Direction Régionale de la Jeunesse et des Sports, l’Institut Régional de Biologie et de Médecine du Sport, le Comité Régional Olympique et Sportif, l’ensemble des médecins du sport de la région Nord/Pas-de-Calais s’associent en liaison avec les collectivités territoriales Conseil Régional Nord/Pas-de-Calais, Conseil Général du Nord, Conseil Général du Pas-de-Calais, pour mettre en place un véritable réseau de prévention sportive et Lutte contre le Dopage.
Nous remercions tout particulièrement Monsieur Michel DUCLOUX, Président Départemental de l’Ordre des Médecins, pour l’aide efficace et précieuse qu’il nous apporte à la mise en place de cette campagne de prévention.
LES POINTS FORTS ET LES POINTS FAIBLES DE LA LOI
Les points positifs : – maintien du certificat médical de non contre indication à la pratique du sport préalable à toute délivrance de licence – mise en place d’un suivi longitudinal au sportifs de haut niveau avec la création d’un livret médico-sportif – renforcement du dispositif de formation spécifique des médecins du sport – création du conseil de prévention et de lutte contre le dopage indépendant et à pouvoir étendu – renforcement des conditions de contrôle centrées sur le rôle des médecins du sport assermentés – officialisation d’une collaboration étroite entre médecins, agents Jeunesse et Sports, agents des Douanes, Répression des Fraudes, Police … – tout sportif licencié ou non peut être désormais contrôlé – renforcement des sanctions pénales : – opposition aux contrôles : 6 mois de prison, 50.000 F D’amende – prescription de produits ou fourniture : 5 ans de prison, 500.000 F d’amende – si bande organisée ou faits sur mineur : 7 ans de prison, 1.000.000 d’amende
· les points négatifs : – l’obligation d’alerte médicale : explication : La loi intitulée « Pour la Protection de la santé des sportifs et la Lutte contre le Dopage » précise dans son titre 1) de la surveillance médicale des sportifs
article 7 : tout médecin qui est amené à déceler des signes évoquant une pratique de dopage – est tenu de refuser la délivrance d’un des certificats médicaux définis aux articles 5 et 6 (certificat médical obligatoire préalable à la pratique du sport en compétition) – informe son patient des risques qu’il court et lui propose soit de le diriger vers l’une des antennes médicales mentionnées à l’article 2) (antenne régionale de suivi médical) soit, en liaison avec celle-ci et en fonction des nécessités, de lui prescrire des examens, un traitement ou un suivi médical – transmet obligatoirement au médecin responsable de l’antenne médicale mentionnée à l’article 2) les constatations qu’il a faites et informe son patient de cette obligation de transmission, cette transmission étant couverte par le secret médical
article 8 : la méconnaissance par le médecin de l’obligation de transmission prévue à l’article 7 ou des prohibitions mentionnées à l’article 19 (prescriptions de substances ou procédés interdits) est passive de sanctions disciplinaires devant les instances compétentes de l’Ordre des Médecins. »
Cet article de Loi, voulu initialement par la commission interministérielle créé pour la mise en place de la Loi, semble soulever de nombreux problèmes.
Le Professeur Jean LANGLOIS, président national de l’Ordre des Médecins précise que l’Ordre est favorable au signalement dans le cas où un sportif viendrait consulter un médecin pour obtenir un certificat médical ou lors d’un examen de suivi. En revanche, il est fermement opposé dans le cas où le sportif viendrait consulter son médecin pour un problème de santé ou même simplement pour un Conseil Médical. En effet , le Professeur LANGLOIS déclare : « on ne peut pas demander à un médecin de soigner et de signaler, cela est totalement déraisonnable ».
Le législateur, en particulier le député Alain NERY, rapporteur du texte précise que l’obligation de signalement s’applique dans le cadre des visites médicales, mais également lors de toute consultation, dont les soins et le conseil.
Cette condition d’alerte sera ou non appliquée en fonction de l’interprétation que chacun en fera. S’il paraît logique que tout médecin qui est amené à déceler des signes évoquant une pratique de dopage refuse la délivrance d’un certificat médical en considérant que son sportif est en danger, il peut être également normal de penser qu’un conseil de suivi lui soit proposé. Dans ce cas, la rédaction d’une lettre de liaison pour le médecin responsable du suivi semble être logique dans le cadre des règles habituelles de déontologie. Reste au sportif d’accepter ou de refuser le suivi spécifique.
La condition d’alerte lors d’une consultation pour une pathologie induite ou non par le sport semble être beaucoup plus difficile à accepter. Certes, la collaboration du sportif peut être acquise et dans ce cas, le suivi pourra être institué. Dans le cas contraire, les médecins du sport peuvent avoir des craintes qu’un sportif blessé et dopé s’éloigne d’eux afin d’éviter de tomber sous le coup de la loi. La porte serait donc entrouverte vers un suivi médical parallèle ou la place du charlatan sera prédominante. Nous obtiendrons alors le résultat contraire à ce qu’à voulu le législateur, avec un renforcement du rôle des soigneurs non médecins.
Cette loi de la protection de la santé des sportifs et de la lutte contre le dopage a le mérite d’exister. Il serait dommage que cet article de loi qui soulève des polémiques puisse rendre celle-ci caduque comme le précise le Professeur Jean LANGLOIS, président National de l’Ordre des Médecins, qui déclare : « cette loi passera à la trappe comme les précédentes ».
Il est indispensable que les décrets d’application, les directives et ordonnances en tout genre qui accompagnent la loi puissent être élaborés à partir d’une concertation nationale, régionale et départementale entre toutes les parties concernées afin que cette loi puisse montrer au reste du monde que la France a pris en main ce problème de santé publique avec tout le sérieux nécessaire vu la part de la situation actuelle.
– Définition du dopage : * Utilisation de substances et procédés de nature à modifier artificiellement la capacité ou à masquer l’emploi de substances ou de procédés ayant cette propriété * de recourir à ceux de ces substances ou procédés dont l’utilisation est soumise à des conditions restrictives lorsque ces conditions ne sont pas remplies * les substances et procédés sont déterminés par un arrêté conjoint du Ministère chargé des Sports et du Ministre chargé de la Santé
– la liste actuelle * substances interdites : stimulants, anabolisants, narcotiques, diurétique, hormones peptidiques et glycoprotéiniques et analogues * méthodes interdites : dopage sanguin, manipulation pharmacologique chimique ou physique * substances soumises à certaines restrictions : Alcool, marijuana, anesthésiques locaux, corticostéroides, bêta-bloquants.
– problèmes actuels * utilisation de la créatine. Définition : la créatine est un oligopeptide à 3 acides aminés (méthionine, arginine, glycine). Combinée au phosphate sous forme de phosphocréatine elle représente une source énergétique anaérobie disponible immédiatement sous le muscle. Aspects légaux : ce produit n’a pas d’existence légale en France. Ce n’est ni un médicament ni un complément nutritionnel. Il n’existe aucune indication médicale à ce produit qui ne peut donc être prescrit par un médecin. La Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) nous a informé qu’aucune autorisation d’emploi de la créatine, en France, n’a été accordée et qu’il est de ce fait interdit de mettre en vente ou de vendre des aliments ou des compléments alimentaires contenant cette substance. Aspects sanitaires : les doses actuellement proposées aux sportifs de 20 à 25 g/jour représentent un équivalent de consommation de 4 à 5 kgs de viande rouge. Les effets à long terme sont inconnus. D’autre part, une possible origine animale de certaines créatines disponibles sur le marché, n’autorise pas à exclure totalement un risque de contamination par le prion de l’ESB (encephalopathie spongiforme bovine). Un principe de précaution élémentaire doit donc inciter quiconque à ne pas en conseiller l’usage.
* le cannabis, dopant ou non ? le Cannabis est une substance psycho-active induisant une modification de l’humeur et peut donc de ce point de vue être considéré comme dopant. La présence de ce produit au sein de la liste interdite s’explique du fait de ses propriétés modifiant la performance
DU MAUVAIS USAGE DU MEDICAMENT
Le milieu sportif considère souvent les médicaments comme des produits miracles, souvent détournés de leurs indications thérapeutiques, utilisé dans de nombreuses circonstances. Cela a conduit à des abus de prescription, mais également et surtout à la mise en place d’un véritable réseau structuré de trafiquants commercialisant à la fois des vrais produits détournés de leurs circuits habituels et des copies fabriquées dans les laboratoires clandestins, en France ou à l’étranger et des « leurs » dont les effets peuvent être encore plus dangereux.
LES ALTERNATIVES AU DOPAGE
Il ne suffit pas de dénoncer les dangers du recours au dopage, il faut proposer des solutions qui permettent aux sportifs et à leur entourage de réaliser leur sport préféré sans avoir recours au dopage.
DU BON USAGE DE L’ENTRAINEMENT
L’alternative passe également par l’amélioration des capacités physiques, psychologiques, techniques et tactiques. Cela passe par un entraînement de qualité, le respect d’une préparation physique généralisée, l’intégration de temps de récupération et la prise en charge d’un calendrier sportif compatible avec les normes physiologiques habituelles.
Cela passe également par une surveillance particulière de l’enfant sportif et en particulier par le contrôle des conditions de jeu en catégorie supérieure. La sécurité du bon usage de ces pratiques passe par un encadrement de qualité, diplômé, régulièrement réévalué.
AGENCE DE PREVENTION SPORTIVE ET LUTTE CONTRE LE DOPAGE
Le Ministère de la Jeunesse et des Sports et le Comité National Olympique et Sportif français ont réalisé une mallette de prévention sportive intitulée « Pour un Sport Net ».
Cette mallette développe l’histoire du sport dans la société et nous permet une meilleure connaissance de la problématique du dopage.
Elle contient : · une bande vidéo de 10 minutes, intitulée « le piège » · un CD Rom diaporama pour la Lutte contre le Dopage · une Cassette Audio réalisée par France Culture · un livret d’information « Pour un Sport Net » · un éventail type « Incollables » pour l’information des jeunes · un pin’s spécifique s’accompagnant d’une Charte de Lutte contre le Dopage · pour les médecins, un livret écrit par le Professeur Jean-Louis GALLIEN : Le Dopage en Questions.
Cette mallette est disponible sur simple demande auprès de la Direction Régionale de la Jeunesse et des Sports de Lille ou auprès de l’IRBMS Nord/Pas-de-Calais.
ECOUTE DOPAGE
Création d’un numéro vert : 0800 15 2000 Ce numéro vert national gratuit et anonyme est ouvert du lundi au vendredi de 8 H 00 à 12 H 00 et de 14 H 00 à 20 H 00.
DOPAGE ET FORMATION MEDICALE
La cellule régionale de lutte contre le dopage est à la disposition de tous les médecins désirant organiser rencontres ou EPU ayant pour thème : le Dopage. Pour tout renseignement, s’adresser directement à l’IRBMS Nord/Pas-de-Calais (coordonnées).
Lire aussi :
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Chronique du Président, le Docteur Michel Ducloux
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