Analyse des ressentis et des freins concernant la prescription d’activités physiques adaptées pour les patients en ALD chez des médecins généralistes ayant réalisé une formation à cette prescription.
Travail réalisé sous le contrôle du COPIL by IRBMS « mieux prescrire l’activité physique sur ordonnance », présidé par le professeur Jean-Paul FRANCKE.
*Thèse soutenue par Benjamin RUCAR à Lille le Jeudi 27 Septembre 2018, le jury était composé de :
- Président : Monsieur le Professeur Julien GIRARD
- Assesseurs : Monsieur le Professeur Denis DELEPLANQUE, Madame le Docteur Valérie FOURNEYRON, Monsieur le Docteur Luc DAUCHET
- Directeur de Thèse : Monsieur le Docteur Patrick BACQUAERT
Contexte : l’activité physique, facteur de prévention
Au niveau mondial, un adulte sur quatre manque d’exercice et plus de 80% des adolescents n’ont pas une activité physique suffisante. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la sédentarité est à l’origine chaque année de 2 millions de décès dans le monde et de nombreuses pathologies chroniques.
De même, l’inactivité physique est responsable d’environ 10% des décès en Europe. L’impact économique, le coût de la sédentarité est chiffré à 67,5 Mds de dollars (61 milliards d’euros) par an, soit 53,8 milliards de dollars de dépenses de santé et 13,7 milliards de dollars de perte de productivité.
Le ministère des sports (Bureau du sport professionnel et de l’économie du sport) a chiffré le coût de la sédentarité à 17 milliards d’euros par an pour la France, dont 14 milliards pour les dépenses de santé.
Une thérapeutique non médicamenteuse
L’activité physique et sportive est reconnue comme thérapeutique non médicamenteuse par la Haute Autorité de Santé (HAS) depuis 2011. Suite aux travaux et à de nombreuses expérimentations notamment menées dans le cadre du Plan national Sport Santé Bien-être 2012-2018, la loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016 a introduit la possibilité, pour le médecin traitant, de prescrire une activité physique adaptée aux patients atteints d’une Affection de Longue Durée (ALD), dans le cadre du parcours de soins.
C’est à ce titre que la stratégie nationale de santé pour la période 2018-2022, définie par le décret n° 2017-1866 du 29 décembre 2017, reconnait l’activité physique comme un facteur de prévention et encourage au développement de la pratique tout en veillant à ses conditions de dispensation. (Source : SNSS).
La prescription de l’APA : les enjeux de la formation
La prise de conscience des pouvoirs publics concernant le poids de la sédentarité comme enjeu de santé publique a permis la mise en place du dispositif « sport santé sur ordonnance » permettant aux médecins généralistes (MG) de pouvoir prescrire de l’activité physique adaptée (APA) aux patients porteurs d’une ALD.
Cependant la généralisation de ce dispositif est difficile à se développer en raison de nombreux freins identifiés dans des études précédentes.
L’objectif principal de l’étude était d’évaluer les ressentis et les freins à la prescription d’APA chez les MG après avoir effectué une formation à la prescription.
Les objectifs secondaires étaient de mettre en évidence les attentes concernant la mise en place d’actions sport santé et de comprendre pourquoi la somme de ces motivations n’aboutit pas à un véritable maillage sport santé en France.
Matériel et Méthode utilisés pour cette étude
Il s’agit d’une étude descriptive qualitative, prospective, interrogeant les médecins généralistes ayant réalisé une formation à la prescription d’activité physique adaptée en ligne via le MOOC de l’IRBMS ou en présentiel via FMC-ActioN par questionnaire électronique envoyé de février à mai 2018.
675 mails ont été envoyés avec un taux de réponse de 23.3%.
Au total 96 MG répondaient aux critères d’inclusion :
- 79% considéraient cette formation nécessaire.
- 64% se sentaient aptes à prescrire de l’APA.
- 85% répondants convaincus du bénéfice de cette prescription après la formation mais peu ont prescrit.
- Pour optimiser la prescription, 73% voudraient une consultation et une cotation spécifique.
- 57% disent avoir eu des refus de prescription en raison du manque de financement et 82% affirment que c’est un frein à leur prescription.
- 75% estiment ne pas être suffisamment informés des dispositifs régionaux « sport santé » avec 81% ayant du mal à trouver des structures d’accueils.
- Selon les MG 77% estiment que le Ministère de la Santé est l’institution la plus adaptée pour répondre à cet enjeu.
Comment améliorer le dispositif de prescription de l’APA ?
De nombreux freins émergent de notre étude limitant la généralisation du dispositif sport santé sur ordonnance. Notre panel de médecins généralistes sensible à la prescription de l’APA comme thérapie non médicamenteuse propose :
- D’accompagner tous les acteurs en renforçant la formation.
- De renforcer le rôle du Ministère de la santé dans le co-pilotage.
- De sensibiliser les professionnels de la santé et les patients concerné à la thématique sport santé.
- D’optimiser le rôle des réseaux sport santé auprès des médecins généralistes.
- De mettre en place un financement réaliste et pérenne.
Les résultats de l’enquête et les principales conclusions
1/ D’accompagner tous les acteurs en renforçant la formation
« Pensez-vous que cette formation était nécessaire avant de prescrire de l’activité physique adaptée sur ordonnance ? » : Deux tiers des répondants (45% tout à fait d’accord et 34% d’accord) étaient d’accord pour dire que cette formation était nécessaire avant de prescrire de l’APA.
2/ De renforcer le rôle du Ministère de la santé dans le co -pilotage
« D’après vous, quelles institutions vous semblent les plus adaptées à répondre à cet enjeu de santé publique et à optimiser le quotidien de la prescription ? » : Selon les répondants, l’institution la plus apte à répondre à cet enjeu de santé publique est le Ministère de la Santé (77% de réponses positives).
3/ De sensibiliser les professionnels de la santé et les patients concerné à la thématique sport santé
« Je suis suffisamment informé sur les dispositifs législatifs réglementant la mise en place de la prescription de l’activité physique adaptée aux patients en ALD » : La moitié (42% pas d’accord et 9% pas du tout d’accord) considère ne pas être assez informée sur les dispositifs législatifs réglementant la prescription d’APA. Seulement 27% des répondants (9% tout à fait d’accord et 19% d’accord) disent être suffisamment informés et 21% ne savent pas.
4/ D’optimiser le rôle des réseaux sport santé auprès des MG
« Je suis suffisamment informé sur le plan régional « sport santé bien être » mis en place par mon ARS » : La plupart des répondants (47% pas d’accord et 28 % pas du tout d’accord) dit ne pas être informée sur le plan régional du réseau « Sport santé bien être » contre seulement 9% pour les médecins suffisamment informés.
5/ De mettre en place un financement réaliste et pérenne
« Le non remboursement est un frein à ma prescription ? » : De nombreux répondants soit 78 sur 96 (82%) affirment que le non remboursement est un frein à leur prescription. Seulement 9% n’estiment pas que le non remboursement soit un frein et 9% ne se prononcent pas.
De nombreux freins émergent de l’étude expliquant la difficulté de la généralisation du dispositif « sport santé sur ordonnance ». Notre panel de médecins tous formés à la prescription de l’activité physique comme thérapie non médicamenteuse (en présentiel ou MOOC) apporte une contribution positive afin de développer le recours à la prescription d’APA dans le cadre de la Stratégie Nationale Sport Santé.
La presse en parle…
- Le Monde : Lever les freins à l’activité physique sur ordonnance : Manque de temps, de connaissances, peu de chances de réussir à changer le comportement des patients… les raisons de la faible prescription de sport santé sont encore nombreuses… Par Pascale Santi, le 14 novembre 2018.
Le Mooc by IRBMS
Des médecins et des professionnels du Sport Santé ont travaillé ensemble pour mettre en place un mooc destiné aux professionnels de la santé mais aussi aux acteurs qui désirent acquérir un langage commun en lien avec la prescription du sport sur ordonnance.
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