Tout savoir sur les lésions musculaires et leurs traitements

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Les muscles de la cuisse

Toute évolution atypique de lésions musculaires doit pouvoir faire suspecter une pathologie sous-jacente sans rapport avec la pratique sportive.

Plus de 30% des blessures lors d’une pratique sportive sont représentées par une lésion de type musculaire de gravité variable.

Tout sportif a, a eu, ou aura un jour un ressenti douloureux musculaire avec certaines prédilections selon les sports ainsi les footballeurs seront touchés aux ischio-jambiers et aux adducteurs alors qu’à la course à pied ou pour d’autres sports il s’agira des quadriceps ou du mollet (tennis leg).

Le type et la gravité des lésions varient de la semble douleur anodine à la rupture complète ainsi tout incident mérite un diagnostic rapide afin d’éviter toute séquelle lourde en conséquence.

Selon les études et cohortes 15 à 25% des blessures en sports collectifs entraînent des lésions musculaires des membres inférieurs et 25% des joueurs se plaindront de lésions musculaires aux ischio-jambiers pendant la saison sportive. A noter que plus le niveau s’approche du loisir plus les incidences sont élevées.

Les rechutes sont importantes de 4 à 10% et plus on s’approche du haut niveau plus l’incidence est élevée et les causes doivent être analysées afin de limiter ces récidives entraînant de longues semaines en dehors des stades et une perte financière et sportive.

L’examen clinique garde toute son importance avec une connaissance du mécanisme lésionnel et des antécédents musculaires du blessé. Il sera aidé toutefois de l’imagerie médicale comme l’échographie musculaire et évalué plus rarement par la réalisation d’un IRM.

Diagnostic clinique des différentes lésions musculaires

L’interrogatoire permet de noter :

► Le mécanisme lésionnel

  • quelles sont les circonstances d’apparition de la lésion (en début, en fin d’effort) ?
  • quel sport pratiqué ?
  • dans quelles conditions ?

► Puis

  • Intensité de la douleur initiale,
  • perception d’un craquement ou d’un coup de fouet,
  • apparition immédiate d’un œdème ou d’une ecchymose,
  • y a-t-il eu impotence fonctionnelle immédiate, ou au contraire poursuite de l’effort ?

L’examen clinique

  • Inspection du chef musculaire atteint,
  • examen comparatif controlatéral,
  • palpations : y a-t-il une rétraction ou au contraire une déhiscence ?
  • le testing musculaire est-il douloureux ?
  • on élimine selon les cas les diagnostics différentiels comme des ruptures tendineuses ou des lésions artério-veineuses.

Examen par imagerie médicale

Echographie

Examen Gold Standard qui est toutefois « opérateur » dépendant, ce qui veut dire qu’il faut suivre l’évolution avec le même échographe et le même médecin. On peut aussi utiliser cet examen afin de ponctionner un hématome post-traumatique. A noter l’intérêt potentiel de faire aussi un écho doppler afin de quantifier un flux sanguin de d’émettre un diagnostic différentiel.

IRM

Examen plus coûteux et plus long en terme d’attente de rdv. Il apporte plus de précision sur le devenir musculaire et les temps d’arrêts de pratique. Il doit être réservé aux sportifs de haut niveau ou travailleurs manuels après un accident de travail.

Classification des lésions musculaires

Avertissement : la classification établie ci-dessous correspond à celle d’un usage courant mais il existe des critères médicaux permettant de mieux appréhender les temps d’arrêt et les techniques de réathlétisation post traumatiqu.

Accidents musculaires sans lésions anatomiques

Crampes, courbatures, contractures : il s’agit d’un muscle fatigué, riche en déchets, induré et douloureux. La durée de la douleur va de quelques minutes pour la crampe, jusque 5 à 10 jours pour la contracture. Pas d’image échographiquement significative.

Accidents musculaires intermédiaires

Avec ou sans lésion anatomique, il s’agit de la contusion avec hématome. Le tissu musculaire est violemment comprimé par un choc direct ou indirect (béquille). Il existe un hématome. La complication à craindre est l’enkystement ou l’ossification de l’hématome. Le diagnostic échographique est souvent nécessaire.

Accidents musculaires avec lésions anatomiques

L’élongation

Il s’agit d’une sollicitation excessive du muscle à la limite de la tolérance de son élasticité. On retrouve quelques déchirures de fibres qui saignent. La douleur est limité non exquise mais brutale. L’impotence fonctionnelle peut être limitée par la douleur. Absence d’ecchymose. Le sportif a souvent pu continuer son activité malgré la douleur.
L’échographie peut être négative. L’on retrouver dans certains cas une zone hypoéchogène. Temps de repos : de 10 à 15 jours.

Le claquage ou déchirure

Il s’agit d’un stade plus poussé où les fibres en faisceau sont déchirées. L’incident est brutal, avec une douleur fulgurante. En aucun cas, l’accident ne passe inaperçu. L’arrêt du sport en cours est immédiat, la poursuite de l’activité physique est impossible, il s’agit du véritable motif de consultation.

La douleur est le maître symptôme, mais n’est en aucun cas fiable pour le pronostic évolutif. Dans quelques cas, l’on constate un œdème lésionnel ou périlésionnel avec hématome. La palpation réveille la douleur vive et exquise localisée dans la zone initiale. Il peut y exister une contracture réactionnelle. Le ballottement est sensible. Les mouvements actifs ou passifs sont douloureux.

Diagnostic échographique : remaniement avec zone hypo et hyper échogène et hétérogène, présence d’un hématome. Temps de repos : de 15 à 30 jours minimum.

La rupture ou désinsertion

C’est l’accident le plus grave : il s’agit toujours d’un coup de poignard en plein effort avec douleur syncopale. La chute est fréquente mais non systématique. L’arrêt de l’action est immédiat. Les signes fonctionnels sont essentiellement la douleur immédiate précise, localisée, exquise et syncopale et l’impotence fonctionnelle totale à l’inspection, on observe une encoche, avec une tuméfaction globuleuse qui peut dépendre du degré de rupture.

L’hématome et l’œdème sont visibles rapidement, avec une zone plus tendue périphérique. La palpation est très pénible pour le patient. Le ballottement musculaire est totalement aboli. Les mouvements actifs et passifs sont impossibles, voire hyperalgiques. L’échographie retrouve une zone précise avec une solution de continuité. Temps de repos : de 30 à 60 jours ou plus.

Accidents musculaires FOCUS

Terminologie et classification des blessures musculaires dans le sport

Les complications des lésions musculaires

Les récidives

Souvent dues à une reprise trop précoce des activités sportives ou à une mauvaise prise en charge initiale. Elles sont localisées à la lésion initiale. Un bilan plus complet s’impose alors.

L’hématome compressif

Important dans le cadre du diagnostic différentiel, avec un syndrome vasculo-nerveux. Il provoque des signes vasomoteurs sous-jacents. Le traitement consiste en une évacuation sous celio ou chirurgicale.

L’hématome enkysté

Par mauvaise prise en charge initiale. Les facteurs favorisants sont les massages locaux intempestifs, la négligence de la blessure et un mauvais état circulatoire prédisposant. L’évolution se fait souvent vers la chronicité. le traitement peut consister à une évacuation sous échographie musculaire, en prenant soin de respecter les règles habituelles d’asepsie. Un drainage chirurgical peut être conseillé.

La thrombophlébite

Il s’agit d’un tableau classique de phlébites sur accidents musculaires. Diagnostic différentiel souvent difficile. On doit s’aider d’un bilan angiologique complet avec réalisation d’un Echo-Doppler.

L’ossification post-traumatique

Les facteurs favorisants sont représentés par la mauvaise prise en charge initiale, avec des massages locaux trop appuyés. L’évolution se fait vers une gêne fonctionnelle. Le traitement est difficile. La radiothérapie peut être essayée en première intention.

Prise en charge et traitements des lésions musculaires

Attitude pratique sur le terrain

  • Arrêt de l’activité immédiate,
  • Règle habituelle : protocole GREC  [Glaçage/ Repos/Élévation/Compression],
  • Pansement compressif,
  • Immobilisation relative ou totale,
  • Ne pas faire : masser, mettre de la chaleur, mobiliser ou ignorer la gravité potentielle.

FOCUS

Une prise en charge plus adaptative

Attention l’immobilisation et l’élévation sont les points les plus importants vous ne devez pas masser ni mettre de la chaleur. Mettre de la glace reste un conseil consensuel mais certaines équipes médicales proposent d’autres prises en charges comme :


BON À SAVOIR

Rôle de la glace dans le traitement des lésions musculaires

Le froid permet de limiter la constitution d’un hématome compressif. De plus, il est un antalgique naturel enfin il limite l’installation de l’inflammation. Or il doit exister un équilibre entre réaction de l’organisme par la création d’une petite inflammation naturelle qui est indispensable pour stimuler la réparation tissulaire et à l’opposé par l’installation d’une forte inflammation préjudiciable à la réaction réparatrice de l’organisme d’où cette interrogation sur l’usage exagéré de la cryothérapie.

Nous conseillons, en absence d’avis médical, de continuer le protocole « RICE » mais sans la prise d’anti-inflammatoire.

Au cabinet médical

La consultation doit se faire au plus vite en post-traumatique.

Conduite idéale
  • Effectuer un diagnostic lésionnel afin d’évoquer une stratégie thérapeutique concernant la durée du repos imposée.
  • Pour s’aider et établir la classification lésionnelle le médecin demandera une échographie qui sera l’examen « gold standard ».
  • Dans l’attente des résultats le médecin proposera une prise en charge adaptée basée sur l’immobilisation totale ou relative.
  • En cas de douleur le médecin proposera des antalgiques courants et selon les indications demandera de continuer l’application de glace selon le protocole qu’il utilise et un arbre décisionnel médical.
  • Le médecin doit prendre en compte la phase de 3 à 5 jours qui correspond à l’évolution de la dégénérescence des fibres musculaires et du saignement éventuel avec formation d’une inflammation.
  • Puis secondairement le médecin doit prendre en compte la phase de 3 à 4 semaines qui est celle de la régénération et la production d’une « cicatrice » des tissus lésés.
  • Intérêt donc de la prise en charge « PEACE AND LOVE » en des techniques d’étirements contrôlés selon le résultat des échographies.
Le traitement général et médicamenteux
  • Utilisation des toniques veineux ou anti œdémateux,
  • anti-inflammatoires par voie générale à partir du 4ème jour si nécessaire. ATTENTION : chaque médecin reste juge de sa thérapie mais aucun consensus ne permet de dire si les AINS per os sont utiles ou au contraire contre-productifs en gênant la récupération.
  • antalgiques conseillés avec prudence,
  • maintien d’une contention ou mise en décharge.
Autres traitements pour les spécialistes de la médecine du sport
  • Infiltration de corticoïdes => non recommandé.
  • Injection d’anesthésique local => peu d’indication.
  • Injections de PRP => selon l’expérience de chaque médecin en fonction de la gravité de la lésion et du stade de récupération au moins trois séances à intervalle de 7 jours.
  • Injection de cellules souches => la thérapie cellulaire consiste à greffer des cellules afin de restaurer la fonction d’un tissu ou d’un organe. L’objectif est de soigner durablement le patient grâce à une injection unique de cellules thérapeutiques.
  • Prise de Actovegin : doit faire la preuve de son utilité. Les athlètes l’utilisent pour améliorer leur endurance et leur guérison musculaire, après des entraînements intenses donc attention aux règles antidopage.
  • Prise de Traumeel : médicament homéopathique composé de 14 éléments avec des propriétés pour le traitement d’affections de l’appareil locomoteur, incluant le traitement de soutien des traumatismes légers ou modérés ainsi que des douleurs et inflammations légères des muscles et des articulations. ATTENTION à respecter la législation Française concernant l’usage de ce produit.
  • Alimentation « de restructuration » comme les jus de cerises ou de grenades mais aussi selon le docteur Fréderic Maton les agrumes.

Traitement chirurgical

Peu d’indications chirurgicales en première intention en dehors des complications comme pour un hématome enkysté. Si besoin la chirurgie peut être précoce mais il ne faut pas confondre chirurgie musculaire et réparation tendineuse.

Traitement des lésions musculaires par kinésithérapie

  • Prise en charge poly structurelle : tests évaluatifs, mise en confiance, restructuration proprioceptive, tonus musculaire, travail isocinétique et conceptualisation du geste sportif.
  • Prescription de physio électrothérapie et rééducation précoce selon le diagnostic initial, avec une stratégie bien encadrée, en accord avec le kinésithérapeute.
  • Ondes de chocs ? ultrasons ? en période cicatricielle.

Durée de repos relatif selon la nature de la lésion.

Le kiné est un des éléments clé de la réussite post-traumatique. Il doit redonner confiance et proposer des séances progressives et adaptées de reprogrammation musculaire.

Réathlétisation et réadaptation à l’effort et reprise des activités sportives

Il s’agit :

  • De retrouver une confiance en « ses muscles ».
  • De la phase post-thérapeutique introduisant progressivement un ré entraînement graduel.
  • D’un accompagnement psychologique et motivationnel.
  • De la mise en place d’une contention, dite strapping qui est souvent conseillée.

Exemple de réathlétisation : la reprise de la course à pied

Elle doit se faire de façon progressive. Une fois que le patient peut marcher sans gêne ni douleur nous pouvons lui proposer d’alterner : 30 mètres de course / 20 mètres de marche ou 1 min / 1 min.

Ce qui est important ici c’est l’éducation du patient : « Nous allons reprendre la course alternée à 25% de votre vitesse maximale ». C’est au patient de déterminer ce que représente 25% de sa vitesse maximale, nous allons évoluer au ressenti du patient.

La suite de la progression se fera vers la course continue :

  • 10-15-20-25-30 min à 30%-40%-50%-60%-70% de la vitesse maximale.
  • Entre 70 et 90% de la vitesse maximale, l’entrainement se fera sous la forme d’interval training et une progression de 10 en 10% puis de 5% en 5% entre 90 et 100% de la vitesse maximale.

Pour la suite, on intégrera les exercices pliométriques à basse puis haute amplitude, les changements de directions, les déplacements avec ballon et enfin la réintégration dans les séances d’entrainement avec l’équipe.

Le geste sportif sera effectué dans un entraînement non spécifique, puis au bout de 3 ou 4 entraînements, reprise spécifique du geste ayant provoqué l’accident initial.

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Prévention des lésions musculaires

La technique de prévention consiste à l’analyse des facteurs de risque basé essentiellement sur la forme physique et musculaire du sportif dont en développant des programmes adaptés comprenant l’entrainement cardiovasculaire, l’endurance, le tonus musculaire et le travail des muscles agonistes et antagonistes, la proprioception et les contrôle neuro sensitifs.

La prévention est aussi en lien avec la gestion des temps de compétitions, d’entraînements et de récupération.

Tous les facteurs prédisposants seront analysés comme l’état dentaire, la mauvaise diététique, le geste sportif, l’équipement, les gestes bloqués (ostéopathie), etc.

Mais la prévention passe aussi par un bon échauffement d’une durée minimale requise. Consultez à ce sujet notre MOOC sur la Prévention des blessures dont celle du LCA du genou.

On comprend que l’approche multifactorielle de la prévention qui peut être différente selon l’âge, le type de pratique et le sexe, doit être intégrée dans le temps de suivi du sportif.

Conclusion

Le pronostic d’une lésion musculaire dépend surtout de la qualité de l’intervention initiale sur le terrain et de l’approche thérapeutique et diagnostique faite par le médecin.

  • En l’absence de lésion anatomique, la lésion guérit pratiquement toujours sans séquelle, voire spontanément.
  • En présence de lésion anatomique, l’histoire clinique est largement différente, avec la survenue possible de séquelles fibrosantes, voire de complications graves retardant la reprise sportive dans les délais.

Enfin, toute évolution atypique doit pouvoir faire suspecter une pathologie sous-jacente sans rapport avec la pratique sportive.

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